Renée Levi
Lésédy
Opening: 14.03.2024, 18:00-21:00
Exhibition: 15.03. - 10.05.2024
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La peinture est le vocabulaire naturel de Renée Levi. Dans ses expositions, L’artiste le déploie pour que nous puissions en faire une expérience physique et poétique. Pour elle, le temps de l’exposition, cette scène, cet espace étrange offre un moment impulsif et fulgurant. Rien ne sert de chercher les récits et les logiques narratives, ils ont été volontairement réduits. Il s’agit d’expérimenter ensemble une intensité, sa couleur et sa structure.
Comme dans toutes ses expositions, Renée Levi partage ici avec nous une architecture poétique dans un lieu. Les châssis des toiles renversent la perception que nous avons d’elles. Elles sont pour un temps un moyen de densifier notre compréhension de son medium et de son ampleur. Les toiles de Renée Levi deviennent des instants limites de la pensée de la peinture. Si ses œuvres abandonneront peut-être cet état lorsqu’elles redeviendront simplement accrochées au mur, ici elles jouent de leur équilibre propre pour prendre pied dans notre espace commun.
Les deux grands châssis aux couleurs claires et liquides, deviennent des voiles colorés qui filtrent notre regard et en révèlant leur dimension et leur texture. Ainsi, il n’y a plus ni surface, ni revers. Les tons s’imbriquent dans la fibre et se mêlent au dessin des châssis, aux ombres projetées des volumes. Les motifs deviennent une palette naturelle de couleurs possibles. Tout est fait pour que cette immersion soit aussi fragile qu’évidente. La peinture se dépasse et redevient ce contact fugace qu’elle occupe avec nos souvenirs. En décrochant les toiles du mur, on partage peut-être aussi le plaisir de la découverte, le basculement du regard, l’intensité de l’atelier, lorsqu’après le travail l’artiste les a redressées. Renée Levi nous permet de nous approcher d’elle en nous rappelant que le champ des possibles reste toujours ouvert pour penser montrer de la peinture. Ses toiles, dans cette structure, en font la démonstration temporaire et nous nous souviendrons sûrement de cette liberté formelle si par hasard nous devions les retrouver. Le geste de peindre devient un moment complice.
Ainsi, depuis plus de dix ans, Renée Levi donne des prénoms de femmes à la plupart de ses travaux. Ses prénoms restent anonymes. Ils ne portent que vers eux-mêmes, vers leurs douceurs, leurs histoires simples, leurs espaces de rêve, leurs natures intenses. La peinture se double d’un espace émotionnel et sensible.
Lésédy, c’est le prénom africain que l’artiste a choisi pour cette exposition. Comme un statement, il ouvre sur un horizon. Il semble faire échos à des couleurs et des souvenirs lointains. Mais, c’est aussi une consonnance, ici particulièrement accentuée par l’usage d’une graphie française. Ce son qui claque comme un slogan proche de : « laissez dire ». Si la pratique de l’art est l’expression la plus claire de l’individu et de son regard sur le monde alors ce prénom dans les circonstances actuelles pourrait être celui que nous pourrions tous rêver de porter. Lésédy, Renée, autant de forces pures qui se proposent d’écorner la réalité brutale avec la poésie de notre mémoire en couleur.
Samuel Gross